Les fiches de la Clinique 1/9

Fiche n°76 - La mauvaise gestion du dirigeant associatif

Contexte

En France, les associations ont une place majeure dans la vie sportive, culturelle et civique. Elles ont également une place importante dans l’économie du pays, avec un budget global de 113 milliards d’euros en 2020, dont 23 milliards proviennent de subventions versées par les administrations publiques. En conséquence, leur bonne gestion est un enjeu majeur.
 

Qui sont les dirigeants associatifs ?

Le dirigeant de droit d’une association est le membre officiellement investi par les statuts d’un rôle de gestion ou de représentation de l’association. Sa désignation résulte d’une élection ou d’une nomination. Ses missions sont définies par les statuts ou la loi. Dans les faits, il s’agit généralement du président, du trésorier et du secrétaire général ou de tout autre membre du bureau.

Juridiquement, les dirigeants sont titulaires d’un mandat (Cass., Civ. 1ère, 5 février 1991, n°89-11.351). L’article 1984 du Code civil dispose que « Le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne [ici, l’association] donne а une autre [ici, le dirigeant] le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ».

Parfois, un membre de l’association exerce une activité de gestion et se comporte comme un dirigeant de droit sans avoir formellement été désigné comme tel. Il est alors qualifié de dirigeant de fait et sera tenu responsable comme un dirigeant de droit.
 

Comment l’association, en tant que personne morale, peut-elle engager la responsabilité du dirigeant ?

Lorsque le dirigeant associatif manque à ses obligations envers l’association, il engage sa responsabilité personnelle.
La première hypothèse de mauvaise gestion du dirigeant est l’inexécution de ses obligations. Tout mandataire est tenu de remplir les obligations conférées par son mandat.
En présence d’un dirigeant négligeant, il sera nécessaire de démontrer une inexécution de ses obligations et l’existence d’un préjudice pour engager sa responsabilité
Toutefois, cette hypothèse n’est que très rarement, pour ne pas dire jamais, mise en œuvre.
La seconde hypothèse de mauvaise gestion, et la plus courante, est celle de la faute de gestion, c'est-à-dire une faute compromettant les intérêts de l’association ou de ses membres.
Dans les associations, la faute de gestion la plus courante est la violation des statuts. En vertu de l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, chaque association souhaitant se doter de la personnalité morale est tenue de rédiger des statuts, dans lesquels doivent figurer des informations essentielles sur son fonctionnement et son organisation.
Par exemple, la Cour de cassation a jugé que le trésorier d’une association réalisant des placements bancaires, alors que les statuts ne l’autorisaient pas à réaliser une telle opération, commettait une faute de gestion et devait être tenu de réparer du préjudice financier subi par l’association (Cass., Com., 11 février 2014, 13-10.067).

Il est toutefois important de noter qu’il existe une atténuation à la responsabilité du dirigeant. En effet, lorsque le dirigeant ne perçoit pas de rémunération, sa gestion est appréciée de manière moins rigoureuse que celle d’un dirigeant exerçant sa mission à titre onéreux.
 

Qui peut agir au nom de l’association contre le dirigeant ?

Seules les personnes habilitées à représenter une personne morale peuvent intenter une action en justice au nom de celle-ci. Dans le cas d’une association, seuls les organes désignés par les statuts peuvent exercer une action en justice en son nom. En pratique, il s’agit souvent du président de l’association.
Dès lors, il peut être opportun d’accorder un pouvoir de représentation à d’autres organes de l’association pour le cas où une action pourrait être engagée contre un dirigeant de celle-ci.
A défaut, les membres de l’association ne pourront pas agir en son nom. La Cour de cassation l’a confirmé en rappelant que si les textes autorisent l’exercice d’une telle action pour les associés d’une société, aucune disposition similaire n’est prévue au profit des membres d’une association (Cass., Civ. 3ème, 20 juin 2024, 23-10.571).
Attention, les associés peuvent toujours agir en leur nom personnel lorsque la gestion par le dirigeant leur a causé un préjudice personnel.
 

Comment peut-on destituer le dirigeant de ses fonctions ?

Pour destituer le dirigeant associatif de ses fonctions, il convient en premier lieu de se référer à la procédure établie dans les statuts ou dans le règlement intérieur. Si ces textes ne prévoient aucune procédure spécifique, l’article 2004 du Code civil permet de révoquer le mandat décerné au dirigeant associatif.
L’organe ayant élu ou nommé le dirigeant (conseil d’administration, assemblée générale) est compétent pour adopter une délibération en ce sens suivant les règles de quorum et de majorité applicables à la décision ayant donnée mandat au dirigeant.
Attention, destituer un dirigeant de ses fonctions ne vaut pas exclusion de l’association. Le dirigeant destitué conserve la qualité de membre. Pour l’exclure de l’association, il convient de se référer à la procédure disciplinaire associative.
 

Est-ce que les membres de l’association, en tant que personnes physiques, peuvent engager la responsabilité personnelle du dirigeant associatif ?

En principe, en présence d’une faute du dirigeant causant un préjudice aux membres de l’association ou à des tiers, seule l’association, en tant que personne morale, peut être tenue responsable, le dirigeant n’étant qu’un mandataire.
Toutefois, lorsque le dirigeant commet une faute qui est détachable de ses fonctions, c'est-à-dire une faute intentionnelle, d’une particulière gravité et incompatible avec l’exercice normal de ses fonctions (Cass., Com., 20 mai 2003, 99-17.092), alors la victime du préjudice pourra rechercher la responsabilité personnelle du dirigeant.
 

Le dirigeant associatif est-il pénalement responsable des actes commis dans l’exercice de ses fonctions ?

En présence d’une faute de gestion constitutive d’une infraction, la responsabilité pénale de l’association pourra être recherchée, ce qui n’exclut pas la responsabilité des dirigeants (article 121-2 du Code pénal).
Lorsque l’infraction commise par le dirigeant l’a été afin de servir l’intérêt de l’association, alors seule cette dernière pourra voir sa responsabilité pénale engagée.
Toutefois, lorsque le dirigeant a usé de ses fonctions et pouvoirs afin de servir son intérêt personnel, sa responsabilité pénale sera engagée.
Dans cette matière, les infractions les plus récurrentes sont le détournement de fonds et l’abus de confiance.


Fiche clinique proposée par Matthieu BOUCHET, Thibault DELECRAZ et Alexandra BACHELET

Fiche n°75 - Comment détecter une escroquerie ? 

Qu’est-ce qu’une escroquerie ? Elle est définie par l’article 313-1 du code pénal. L’escroquerie consiste pour l'escroc à obtenir un bien, un service ou de l'argent par une tromperie. L’auteur des faits doit avoir l’intention de tromper sa victime.
 

Par quels procédés l’auteur peut-il essayer de vous escroquer / tromper ?

L’escroquerie suppose la réunion d’un élément matériel et d’un élément moral.

Concernant l’élément matériel :
Il peut prendre plusieurs formes. L’auteur doit avoir utilisé l’un des procédés suivants pour vous tromper :

  • L’emploi d’un faux nom ou d’un faux prénom. Cela peut également porter sur un prénom. Il suffit que le nom utilisé ne soit pas celui de l’escroc, peu importe que ce nom soit réel ou imaginaire.
  • L’emploi d’une fausse qualité. Cela peut être un titre ou un diplôme existant ou imaginaire. Pour pouvoir réaliser une escroquerie, la fausse qualité doit être suffisamment crédible pour pouvoir tromper. Par exemple, se faire passer pour un banquier pour soutirer des fonds à la victime.
  • L’abus de qualité vraie. Cela correspond à un mensonge, non pas sur la qualité invoquée, mais sur les déclarations faites. Il est exigé que la qualité invoquée soit de nature à inspirer confiance pour que l’abus de cette qualité puisse avoir en conséquence un certain pouvoir trompeur. Par exemple, un notaire qui fait signer un compromis de vente subordonné à l'acquisition d'un autre immeuble en sachant que le propriétaire de cet immeuble refuse de le céder au prix indiqué
  • Les manœuvres. Cela peut être des mensonges si elles sont accompagnées de faits extérieurs ayant pour but de donner de la force au mensonge. Par exemple, avec l’intervention d’un tiers ou la production de faux bilans.

Quel que soit le procédé employé pour réaliser l’escroquerie, cet acte doit avoir été déterminant dans la remise de votre bien, service ou argent à cette personne.

Concernant l’élément moral :
L’élément moral se traduit par le fait que l’auteur des faits ait eu l’intention de nuire à la victime. En effet, l’auteur doit avoir pleinement conscience de son acte c’est-à-dire d’agir pour tromper autrui. Cette preuve peut résulter des procédés de tromperie qu’il aura mis en place.

A titre exemple, un comptable qui atteste l’exactitude d’un bilan alors que celui est incorrect, sans en avoir connaissance, ne pourra pas être condamné pour escroquerie. En effet l’élément moral fait défaut, car le comptable n’avait pas l’intention de tromper la victime en certifiant l’exactitude du bilan ne sachant pas qu’il était faux.
 

A quoi ces procédés doivent-ils mener ?

Par l’usage de l’un de ces procédés, l’escroc vous incite à lui remettre des fonds ou valeurs. Cela peut être par exemple de l’argent ou des bijoux, ou des biens quelconques sans importance pour leur valeur, la fourniture d’un service ou le consentement d’un acte.

La remise doit être opérée par la victime et doit lui causer un préjudice qui peut être matériel ou moral. Par exemple, le préjudice est matériel si à cause de l’escroquerie la victime s’est appauvrie. En plus de cette perte financière, le préjudice est moral notamment lorsque la victime subit un choc émotionnel.
 

A quoi l’auteur d’escroquerie peut-il être condamné ?

L’article 313-1 du code pénal condamne l’escroquerie à 5 ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende. La tentative d’escroquerie est punie des mêmes peines.

Fiche rédigée par Elisa TRIOULAIRE, Margot BAUDILLON et Vanina LAFOND